Dans le cadre d’un cours sur la nuit à Québec donné par Célia Forget (CELAT), notre membre Lucie K. Morisset, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en patrimoine urbain et professeure au Département d’études urbaines et touristiques de l’École des sciences de la gestion de l’UQAM, présentera la conférence ouverte au public « “La nuit, tous les chats sont gris” : voir la (basse-) ville sous ses apparences » le mercredi 4 octobre à 15 h 30 à l’Université Laval (pavillon Charles-De Koninck, salle DKN-2419). Bienvenue à tous et à toutes!
Résumé :
De même que les personnages de la nuit pour qui ne la connaît pas, le paysage de la ville et les parois de l’espace public qui le jalonnent se présentent à nous de manière indifférenciée. L’on peut ainsi convenir, par exemple, que Saint-Roch et Saint-Sauveur ne ressemblent en rien au Vieux-Québec, mais les particularités matérielles et culturelles qui engendrent cette différence nous échappent la plupart du temps, tout comme les raisons qui permettent de les expliquer.
Mon travail sur ce que j’ai appelé la « mémoire du paysage » a pris racine dans une telle insatisfaction. Je propose, dans cette présentation, de revenir sur quelques-uns des éléments de cette façon de pratiquer l’histoire de la forme urbaine, notamment pour transpercer la surface mince du temps présent et interpréter à partir du temps long les dispositions physiques et imaginaires de la ville. Les sciences historiques peuvent en effet apporter aux sciences sociales la capacité d’aller en-deçà de notre temps pour le comprendre, par exemple en débusquant l’imaginaire invisible qui peut conditionner la lecture d’une forme en ayant plus ou moins commandé sa genèse : tel édifice, tel toit, telle rue ou telle vue dévoilent alors leurs secrets.
À cet égard, les quartiers de la « basse-ville » de Québec, Saint-Roch et Saint-Sauveur, foisonnent d’anomalies qui sont autant de révélateurs, pour peu qu’on s’y intéresse, d’une épopée signifiante et marquante dans les relations entre le tissu urbain et ceux qui l’ont habité, l’habitent et l’habiteront. Il s’agit, pour dire les choses plus simplement, de pratiquer une histoire des représentations qui assume que les formes urbaines sont elles-mêmes des représentations, survenues au fil du temps mais souvent plus impassibles, et conséquemment susceptibles de porter, de génération en génération, des épisodes anecdotiques aussi bien que des visions du monde.
Pour échanger sur l’intérêt d’une telle approche intellectuelle, mon exposé se centrera, après une introduction faisant voir quelques-unes de ces « anomalies », sur une histoire des représentations de Saint-Roch et de la « basse-ville » et sur la manière dont ces représentations s’expriment et se modulent dans le paysage culturel avec lequel nous dialoguons aujourd’hui.