Le numéro « Babel et la crise du symbolisme » (no 146), sous la direction de Martin Nadeau et Michaël La Chance (CELAT), est paru récemment dans la revue Inter, art actuel. « Ce numéro propose une réflexion autour de l’effritement du symbolique dans un monde où le langage cède progressivement la place aux algorithmes et où les signes s’estompent face à l’omniprésence des signaux numériques. » Mouloud Boukala (CELAT) y signe une contribution. Notre membre Michaël La Chance publie également le recueil de poésie Alphé. Le jeudi 30 octobre dès 17 h, à la librairie Point de suspension du centre d’art actuel Bang à Chicoutimi, un double lancement soulignera ces deux parutions et sera suivi d’une sortie de résidence avec l’artiste Martin Wautié.
Pour tous les détails sur cette soirée de lancement, consultez l’événement Facebook.
Présentation du numéro « Babel et la crise du symbolisme » publiée sur le site web de la revue Inter
« L’utopie d’une langue universelle et d’un urbanisme rassembleur, d’une compréhension mutuelle et d’une harmonie mondiale, qui remonte au mythe de la tour de Babel, est remplacée aujourd’hui par le techno-utopisme de la Silicon Valley. Aujourd’hui, nous croyons encore que la possibilité de communiquer par-delà nos particularismes religieux et culturels, la reconnaissance de nos intérêts communs et le partage de nos savoirs et de nos trésors culturels, tout cela devrait nous permettre de transcender la malédiction de Babel. Le capitalisme de surveillance remplace les noms par des code-barres, des codes QR ou des puces. Le projet de la modernité d’instaurer l’universalité (de la justice, du beau, des luttes d’émancipation et des savoirs) est identifié à l’hubris des premiers habitants de Babel. Aujourd’hui, l’hubris moderne d’unifier le monde est frappé par la malédiction de Babel : les cultures se révèlent irréconciliables, chacune possède son langage et ses traumas distinctifs, son éthique d’équité et ses revendications de justice sociale. Nous assistons à un effet Babel lorsque l’éclatement de l’idéal d’émancipation universelle produit un archipel d’identités sexuelles, ethniques, linguistiques. Une dé-symbolisation qui ouvre la voie à une cohabitation de systèmes de croyances ancrées dans des versions idiosyncrasiques de l’histoire. Dans cette Babel éclatée, sa foultitude d’identités, de minorités et de marginalités, les différences sont devenues redondantes et il n’y a plus d’altérité. L’art n’est plus une forme de communication mondiale. Devant un film, un texte, une œuvre on ne pose plus la question « quelle exploration formelle, quelle articulation symbolique? », mais “qui” l’a créé, au nom de quel groupe, quelle intention de résistance, quel refus de l’Occident et du futur pouvons-nous y lire ? Babel, c’est l’Occident : l’Autre comme centre creux, une universalité vide à laquelle nous sommes parvenus par la multiplication et donc la disparition des altérités. »

